Qui était jullien de Paris ?


 

Marc Antoine Jullien dit «Jullien de Paris», l’ombre de Robespierre

Extrait de sa biographie de Michèle Bénaitaut



Marc-Antoine Jullien (1775_1848) né à Bourg-de-péage, dans la drôme, illustre le prototype du jacobin, du Montagnard, au point de rester fidèle toute sa vie au même projet de société, cela semble très plausible si l’on considère sa jeunesse. Il fut élevé selon et dans les idées de Rousseau par deux parents pénétrés d’esprit révolutionnaire et tôt convertis au jacobinisme. En 1789, Jullien a 14 ans, est à Paris et fréquente le Palais‑Royal, à 16 ans il est secrétaire de la Société jacobine de Romans fondée par son père, et il fait ses premiers discours publics à la Société jacobine de Paris! À 17 ans on l’envoie comme élève diplomate à Londres et à 18 ans, surmontant la méfiance du général Servan qui le trouve jeune, il s’affirme comme commissaire des guerres... d’avril 1793 à l’été 1794 il multiplie les missions dans les zones atlantiques troublées, où il agit en grande conformité avec les positions de Robespierre. Qu’un homme si jeune occupe un poste de responsabilité n’est pas exceptionnel pendant la Révolution. Apparemment fort énergique et capable, certainement poussé par son père dans la politique, on ne s’étonne pas qu’il ait surtout manifesté une grande capacité de faire écho aux positions de celui qu’il prend pour maître, Robespierre.

Thermidor lui vaut un an et demi d’incarcération: il n’ a que 20 ans et il commence une carrière politique d’opposant qui durera toute la vie. Jullien, dans son Journal commencé au Plessis (en prison), baptise la nouvelle ère politique «la mort de la patrie». Même en prison il ne cessa son activité de publiciste et libéré à l’automne 1795, il la continua de plus belle. Parmi les accusations de double jeu portées contre Jullien, il y en a une sur son rôle dans la Conjuration des Égaux. Après avoir fréquenté amicalement au Plessis les hommes qui formèrent le groupe de Égaux, il dénonça leurs plans par la suite. Di Rienzo montre que Jullien se désolidarisa très tôt du groupe par incompatibilité idéologique, restant lui‑même ancré au programme toujours constitutionnel des néojacobins. Ces années sont pour lui terribles, puisqu’il voit s’écrouler tous les piliers de la Révolution et nombreux sont ses écrits de réflexion sur cette histoire. Convaincu de la déroute en France, il cherche un espoir du côté des républiques jacobines italiennes jusqu’à ce que son activité politique trop contraire aux ordres du Directoire, en particulier au sujet de la République napolitaine, lui vaille une arrestation.

En fait, Jullien resta fidèle à la définition d’une légalité constitutionnelle qu’il ne cessera soit de respecter soit de revendiquer selon ce que la conjoncture offre ou permet. Tel fut le sens de son activité de publiciste sous le Consulat, l’Empire, la Restauration... non sans être plusieurs fois inquiété. Et lorsque la conjoncture politique ne permet plus d’agir aux vieux jacobins de son genre, il s’investit dans la culture scientifique, fondant la Revue encyclopédique ( 1817-1835) qui visait la vulgarisation de toutes les sciences et dont chaque volume analysait régulièrement la production de cinq ou six pays étrangers et signalait les travaux publiés en vingt-cinq à trente langues diverses grâce à la collaboration des grands centres culturels européens. Il reprenait l’orientation culturelle des Lumières, celle qui avait préparé la Révolution. Pour Di Rienzo, il n’était pas devenu libéral mais retournait aux sources de la pensée sur l’égalité.



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